dimanche 2 mars 2014

Sur la route de Shangri-La : Lijiang, pays Naxi

Suite des merveilleux voyages de Lee le sinologue aux semelles de vent ! Cette fois ce sont des notes qui datent de l'année dernière : voyage au Yunnan (云南), le Sud-Ouest montagneux & mystérieux, le pays des confins !

Il est toujours un peu présomptueux de voyager en se disant « je vais aller comprendre une culture étrangère » ou alors carrément « une culture étrangère ET ancienne ». La culture, c’est ce que vous avez absorbé depuis tout petit, les matières minérales, les pesticides de synthèse et les métaux lourds du terrain dans lequel plongent vos racines, qui ont lentement, jour après jour, depuis l’enfance, imbibé et façonné vos cellules. Bien sûr, ce n’est pas en flânant le nez au vent dans les vieilles ruelles qu’on devient un natif du coin. Mais bon, rien n’interdit de faire quelques recherches sur internet, d’épier les conversations entre touristes et locaux, et de compléter un peu les interstices par la déduction et l’imagination. Ce que je m’empresse de faire pour vous.

Ici à Lijiang (丽江, « belle rivière »), on se trouve au cœur du pays Naxi (纳西 « don de l’Ouest », prononcer xi comme si, la langue bien écrasée au plafond du palais) et on trouve partout des exemples de la culture appelée 东巴 (dongba – refuge d’Orient) : musique traditionnelle, costumes bariolés, artisanat à base de bambou, de bois, de corne, de fibres, mais surtout graffiti. Admirez cette drôle d’écriture, faite de 1400 pictogrammes très évocateurs. Insectes, têtes de souris, feuilles, vaguelettes : on a l’impression qu’on arriverait sans trop de mal à la déchiffrer, tellement les dessins semblent transparents, non ?

En parlant des multiples ethnies de la région, je vous disais « surtout les Naxi »… ce n’est pas par son nombre (pas plus de 250 000), mais plutôt par sa radicale originalité que ce peuple défraie de longue date la chronique au Yunnan et au-delà. Marco Polo en a parlé dès le XIIIè siècle. Marco, intarissable baratineur faisant des moulinets de ses mains, à l’italienne (rappelez-moi de vous faire sa fiche biographique un de ces quatre), est probablement l’auteur de la légende mondialisée des Naxi, société utopiste, anarchiste, phalanstère matriarcal bannissant la propriété, et donc l’asservissement, le mariage, et donc la jalousie. Joseph Rock, qui avait recruté pour ses recherches botaniques des guides et des porteurs naxi, s’est retrouvé tout naturellement à apprendre leur langue et à rêver de découvrir leur organisation sociale.


Hélas ! Les sociétés utopiques ont ça de commun qu’elles ne survivent que dans les régions les plus reculées, bien isolées à l’abri de la contamination par le monde réel. A-t-il réellement existé, le « Royaume des femmes » ? Il tient une grande place dans les récits de Rock (vous savez, l’aventurier botaniste), qui s’est sérieusement pris au jeu, lançant sa lourde caravane d’explorateur à la recherche de la reine du royaume perdu dont parlaient les explorateurs et les aventuriers mais que nul n’avait jamais vu. (à suivre)

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