mardi 2 juin 2015

Le jour où il ne s'est rien passé...





L’Inde a fini par acheter des Rafale ! Hourra ! Pas 126 comme on l’espérait, ni probablement 76 comme on l’a un moment claironné, mais bon 36. Toujours ça de fourgué.


Le premier ministre Modi est donc bien évidemment reçu à l’Elysée. Il l’a bien mérité ! Premier ministre de « la plus grande démocratie du monde », il est fréquentable, lui. Pas comme ces méchants communistes sanguinaires qui essaient vainement de faire oublier le « massacre de Tian’anmen » d’il y a 26 ans ! Quoique…



On me signale à l’oreillette que le saint homme ne serait pas exempt de quelques erreurs de jeunesse. En 2002, semblerait-il, chef à l’époque de l’Etat indien du Gujarat (l’un des plus peuplés du pays), il aurait joué le Sarko-Marine et brandi un peu imprudemment l’argument (curieusement universel) de l’identité nationale en danger et du Gujarat aux Gujarais… Résultat, un accident de train excite des Gujarais qui y voient sans preuve un attentat musulman, Modi aurait par son silence encouragé les soupçons, des ratonnades auraient été organisées, bref 2000 personnes seraient mortes de mort violente (deux mille : hommes, femmes, enfants ! Lire ici un résumé détaillé des faits par NY Times). 

De là à dire que M. Modi a du sang sur les mains… Le premier ministre de l’époque l’avait contraint à démissionner de son poste de chef de région. Mais, miracle de la démocratie ! il s’était représenté aux élections suivantes sur un programme anti-musulmans et avait été réélu triomphalement ! Depuis 2014, il est premier ministre du pays et sa biographie est désormais lavée des quelques petites taches qui pouvaient en troubler un peu l’immaculée blancheur…Lire ici les détails de sa biographie autorisée, critiquée en Inde, mais pas trop.
 
On peut dire qu’il a de la chance de ne pas être chinois et d’acheter des Rafale. Sinon, vous pensez bien qu’on n’irait pas serrer la main d’un pareil affreux jojo… Loin de moi l’impudence de diaboliser l’Inde ou les Indiens, ni d’ailleurs d’idéaliser sa voisine la Chine ; mais lorsqu’on voit l’état de « la plus grande démocratie du monde », on se dit que « la plus grande dictature du monde » n’est pas si mal que ça après tout…

Si je vous raconte tout ça, c’est pour le en venir à nos relations avec la Chine, toujours soi-disant entachées par la répression sur la place Tian’anmen (1989). Trois générations de dirigeants se sont succédé à la tête du pays, mais l’Occident continue, ceint d’une vertueuse unanimité, de leur reprocher comme une faute personnelle ces événements tragiques …



Chaque année début juin, la presse libre se rallie autour du thème de Tian’anmen pour intenter à à Xi, comme avant lui à Hu et avant encore à Jiang, un procès qui date de Deng et Li. Tous les 4 juin, la presse internationale se mobilise pour glorifier ce marronnier inépuisable.



Réaction tout aussi pavlovienne en Chine d’ailleurs ! Chaque année on sent frémir les autorités qui multiplient les déclarations comme quoi « c’est un jour comme les autres, sauf qu’il ne s’y est rien passé, qui doit donc être non-commémoré comme il se doit ». Renforcement des mesures de sécurité, discrètes directives (pas de vêtements noirs ce jour-là), internet évidemment ratissé et censuré plus que de coutume, bref : alerte idéologique maximale pour afficher une normalité et une banalité la plus exceptionnelle possible en ce jour extraordinairement ordinaire…

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